« Allo Blossom ? » « Tu avais une chance sur deux, mais si tu peux même pas différencier tes propres enfants .. » « Bony, comment vas-tu ma chérie ? » « Comme si ma réponse t'intéressait vraiment. » « Ne commences pas s'il te plaît, je suis fatiguée. » « Tu es fatiguée ? fatiguée de quoi, passer tes journées à regarder la télé en sirotant un martini dry ? ça doit être épuisant, comme je compatis. » « Je te rappelle que je n'ai pas choisi de me retrouver dans cette situation. » « Comme c'est facile maman, reporter la faute sur les autres, tu ne sais faire que ça de toutes façons. » « C'EST MOI QUI CONDUISAIT LA VOITURE PEUT-ÊTRE ? » Et c'était reparti. Je me servais un verre de la réserve tout mon frère tout en levant les yeux au ciel. J'aurais beau avoir déménagé au bout du monde pour ne plus voir son visage, sa voix venait toujours me pourrir la vie. N'allait-elle jamais comprendre que c'était un accident ? Définition d'accident : Un accident est un événement aléatoire, fortuit, qui entraîne des dommages vis-à-vis des personnes, des biens ou de l’environnement ou qui entraîne un engagement de responsabilité. C'est wikipédia qui l'a dit, pas moi. « C'était un accident maman ! » « Appelle-le comme tu veux, mais ton frère est mort et c'est de ton entière faute. » Cinq ans plus tôt, alors que je fêtais mon premier mois d'adulte responsable en estrenant mon permis, ma mère et moi eûmes un accident de voiture. J'étais derrière le volant, elle était enceinte. Une grosses à son âge, c'était impensable, seulement elle s'était trouvée un nouveau copain, de quinze ans son cadet, et mônsieur rêvait de pouponner. Morte de peur à l'idée de se retrouver seule à quarante-cinq ans, elle accepta. À seize ans, je perdais mon petit frère, ma mère et mon innocence dans la même soirée. Ma mère osa même m'attaquer en justice, mais les charges furent abandonnées, faute de preuve. Pour elle tout était de ma faute, et depuis ce jour, elle se chargea de me le rappeler, chaque minutes passantes, comme si je pouvais oublier. En réalité il y avait bien une chose qui pouvait me faire oublier ma misérable vie, me laissant rêver à une vie meilleure, durant quelques heures : la boisson. Mon père nous avait offert sa collection de bouteilles en quittant la maison, un signe ? Bien évidemment cela commença gentiment, une bière à l'heure du goûter avec les potes pour éviter de rentrer à la maison plus tôt, mais à l'âge de la majorité européenne, je tournais à trois shots de tequila en guise de petit déjeuner et un verre de whiscola en guise de rince bouche après m'être brossées les dents. « Si je suis l'erreur de ta vie, pourquoi perdre ton temps à prendre de mes nouvelles ? » BIP BIP BIP. Cela prit deux ans à ma famille pour réagir, et par famille j'entends mon frère. Après un séjour exceptionnellement long en rehab, je me devais de quitter le cocon familial, je ne pouvais plus faire face à cette femme qui se prétendait ma mère mais passait plus de temps à me faire payer qu'à m'aimer. À ma sortie, Blossom m'attendait avec trois valises et deux allers simples pour Buenos Aires. C'était il y a trois ans.

« BOOOOOONY-A ! OUVRE CETTE PORTE IMMÉDIATEMENT ! » Pas du matin, je me réveillais grognon sous les martèlements de la porte d'entrée. Je n'avais juste pas le courage de sortir de mon lit, peut-être que si j'attendais assez longtemps, elle perdrait patience et reviendrait plus tard ? « Je sais que t'es là, je bougerais pas jusqu'à ce que tu ouvres. » C'était sans compter sur l'acharnement légendaire d'Everlynn. Et la mauvaise humeur permanente de mon frère. « Putin Bones lèves ton cul ou je lui fais bouffer sa langue à ta copine ! » À contre-cœur, je quittais mes draps et rejoignais la porte en trainant des pieds. Je me préparais mentalement tout en lui ouvrant, à tous les coups Ever allait me sauter dessus, débordante de bonne humeur comme à son habitude, pendant que je ne rêverais que du bon café noir que j'allais me faire quand mes forces auraient regagné mon corps. « J'ai un gros problème, j'ai embrassé Jaime. » Je ne l'écoutais que d'une oreille mais sa déclaration attrapa toute mon attention. WHAAAAAT ? « Techniquement c'est lui qui m'a embrassé, puis je l'ai frappé de toutes façons ensuite alors .. » « Répètes un peu ?! » « J'ai giflé Jaime. » « Non, avant. » Everlynn et Jaime, l'histoire d'une vie. L'histoire de ma vie en l'occurrence, j'en entendais tellement parler que j'avais l'impression d'être membre à part entière de cette relation. D'ailleurs c'est un peu à cause de lui que tout a commencé : Jaime a mit Everlynn enceinte, Jaime a abandonné Everlynn, Everlynn a pleuré à l'hôpital, Bone-Avery a sauvé Everlynn de la détresse l'hôpital. C'est très schématisé, mais c'est quelque chose comme ça. « T'es incroyable Ever, et Jude dans l'histoire ? » La vie d'Everlynn croulait sous les complications, et je ne vous parlais de la mienne, je me demandais vraiment pourquoi avais-je encore espoir que de simples aventures nous arrivent ? avec nous, tout prenait une dimension supérieure. « Je sais pas BA, je sais plus. » Ever et Bony-A, ou l'association de deux âmes en peine. Elle était enceinte, je sortais d'un check-up de routine post-AA, elle pleurait, je rêvais d'un verre pour me rebooster, elle était brune, j'étais blonde. Le destin quoi. Notre rencontre remontait à deux années plus tôt, et depuis, elle me suivait partout. Ou je me la trimballais partout, voyez ça comme vous voulez. Malgré que je ne sois pas née pour faire amie-amie avec les filles, les barbies très peu pour moi, Everlynn avait su trouver sa place dans mon cœur et je dois dire que si j'avais été lesbienne, j'en aurais fait mon quatre heures depuis belle-lurette. « Toi ma chérie, t'as besoin d'un coup, quelque chose de fort. » « Je ne bois pas Bony. » « Moi si. » La seule chose qui nous empêchait de tomber dans le partage d'un cerveau pour deux, c'était mon passé avec la boisson. Je n'avais jamais dit à Everlynn que j'avais été alcoolique, ou à personne d'autre, Blossom et moi avions fait la promesse de repartir de zéro en venant s'installer ici, et ça commençait par planifier un futur stable, par revivre nos cauchemars du passé. Mais je lui dirais un jour à Ever, un jour ...