« T'es qui toi ? » La jeune fille se retourna brusquement, les yeux remplis de terreur, les jambes tremblantes. Devant elle se trouvait un garçon semblant légèrement plus âgé qu'elle. Les cheveux du jeune homme lui cachaient particulièrement les yeux, mais elle put cependant croiser une once de regard terne, mais douce à la fois. L'enfant était torse nu, ne portant qu'un simple short troué et se promenait avec un ballon sous le bras. Soledad était terrorisée. Ses parents travaillaient, et elle, s'étant retrouvée seule à la maison au retour de l'école, s'était trouvée irrésistiblement attirée par le Villa 31 devant lequel elle passait tous les jours. En ce moment même, elle s'en voulait terriblement. Elle le regardait les yeux écarquillés, aucun son ne sortant de sa bouche. Le jeune homme fit un pas en sa direction et la jeune fille ne put s'empêche de se protéger le visage. « Calme toi, je veux pas te faire de mal. » Son bras glissa le long de son visage et rapidement ses yeux recroisèrent ceux du jeune garçon. Son bras retrouva sa place le long de son corps, mais la jeune Ramírez gardait tout de même une position de défense, prête à partir si le besoin faisait son apparition. « Dis moi ton petit nom, ¿cómo te llamas? » La jeune argentine le regarda quelques secondes sans rien dire, puis ouvrit lentement la bouche. « Soledad.. » Cependant, son murmure n'atteint pas les oreilles du jeune garçon et celui-ci continua de la regarder, les sourcils haussés. Elle inspira donc une bonne fois pour toute et dit haut et distinctement « Je m'appelle Soledad. » Le garçon était à présent à genoux devant Soledad afin d'être à sa hauteur, et il lui tendit la main. La jeune fille s'en saisit et le regarda sans dire un mot. La main de l'inconnue était douce et chaude et lui apportait un semblant de sécurité dans cet endroit qu'elle ne connaissait pas. Elle se sentait à l'aise à présent. « Enchanté Soledad, moi c'est Leo. » La jeune fille se contenta de lui lancer un sourire sincère. Son regard se dévia ensuite sur le ballon de foot que le jeune homme avait avec lui. Haussant les sourcils, elle lui posa une question muette tout en jetant un regard intrigué à la balle toute dégonflée. « Ça, c'est un ballon de foot ma jolie. » C'est tout naturellement qu'il lâcha le ballon au sol et se mit à dribbler. La jeune fille le regardait les yeux écarquillés et remplis de milliers de petites étoiles, et lorsque le ballon se retrouva tout à coup sous ses pieds, c'est un regard intéressé qu'elle lança au jeune Leo. Il s'approcha d'elle d'un pas pressé et c'est durant de longues heures que le jeune garçon appris à Soledad à apprivoiser le ballon rond. Après une ultime chute et un ultime fou-rire alors que le soleil commençait à teinter le ciel d'une lueur orangée, le jeune garçon se releva, épousseta rapidement ses shorts et tendit sa main droite à Soledad. « Debout chipie, il est grand temps que tu rentres. » Et durant toute la durée du voyage jusqu'à l'appartement de la jeune fille, cette dernière bien positionnée sur le dos de l'argentin, Soledad ne fit que de se plaindre. « Leo, je veux pas que tu me laisses. » Lui se contentait de secouer la tête en riant et en lui promettant de la revoir le plus tôt possible. Alors qu'ils arrivaient devant la porte d'entrée de l'immeuble des Ramírez, Leo fit descendre la cadette de son dos et à nouveau se mit à genoux devant elle. La jeune fille restait muette, jouant distraitement avec les doigts du plus âgé. Ce n'est que quelques dix minutes plus tard que la jeune fille ouvrit la bouche. « Tu m'oublies pas demain hein ? T'as promis. » Les yeux de la jeune fille de six ans brillaient, et Leo ne put s'empêcher de craquer pour la première fois. « T'inquiète pas, corazón. » Sans prévenir, Soledad se jeta dans les bras du jeune garçon, cachant sa tête dans son cou. C'est fou ce qu'on s'en fichait lorsqu'on était enfants. Le jeune garçon se contentait de caresser le dos de la jeune fille, puis finit par lui ébouriffer les cheveux. « Allez mademoiselle, tes parents vont s'inquiéter. » Enfin, après lui avoir assurer pour la énième fois qu'il viendrait la chercher dans la cour de l'école le lendemain et après avoir déposer ses lèvres sur sa joue, il observa la jeune fille passer le pas de la porte.


« Mais qu'est-ce que t'attends ? centre ! » L'adolescente fixa la personne à laquelle appartenait cette voix, cette personne avec qui elle avait grandi. Car oui, elle avait grandi, et passablement. Ses cheveux lui atteignaient maintenant le milieu du dos, ses traits s'étaient marqués, ses yeux brillaient d'encore plus d'étoiles qu'auparavant. Avec elle avait grandi son meilleur ami, son tout. Leo. Le même Leo qui allait faire une crise de nerfs si elle ne se pressait pas pour lui passer le ballon. Cependant, alors qu'elle ajustait son tir, elle subit le tacle le plus agressif dont elle n'avait jamais été atteinte auparavant. Elle sentit sa cheville lâcher et se retrouva rapidement au sol, un corps non identifié tombant avec elle. Au loin, elle put entendre la même voix que quelques instants auparavant. « Oh putain, ADRI ! » Elle n'eut même pas le temps d'ouvrir la bouche que son meilleur ami se trouvait déjà à ses côtés, prenant la main de la jeune femme dans la sienne, caressant ses phalanges en un vain essai de la calmer. Les larmes coulaient sur ses joues sans même qu'elle ne s'en rende compte. « Ça va aller, corazón, ça va aller. » Tout s'enchaîna très vite. Les sirènes de l'ambulance, la civière, le séjour à l'hôpital après ce double verdict : double fracture du péroné. Les parents de la jeune fille prirent un décision radicale : l'envoyer dans la résidence secondaire de ses grands-parents à quelques 300 kilomètres de-là, avec pour seule compagnie son kinésithérapeute afin d'accélérer là remise en forme. Elle n'eut le temps de dire au revoir à personne qu'elle se retrouvait déjà dans la magnifique ville de Rosario. Rapidement, elle établit une relation de confiance entre elle-même et son Kiné, un homme nommé Juan Miguel. Chaque jour, elle réapprenait à marcher avec l'aide de cet homme qui tout naturellement s'imposa comme un deuxième père. Une amitié incomparable réunissait Adri et Juanmi, et lorsque vint le jour où enfin elle put rentrer chez elle, six longs mois de rééducation plus tard, elle lui fit promettre de revenir la voir le plus rapidement possible afin de ne pas s'oublier l'un-l'autre.


« Comment ça il est parti ? » La jeune Ramírez regardait sa mère les yeux baignés de larmes. Six mois d'attentes, de solitude, et au bout du voyage, l’absence. Et un coeur brisé de plus, un.